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C’est là que les troupeaux parquent durent l’été.

De toutes parts l’eau coule avec limpidité.
Les vaches gravement viennent boire aux cascades.

Des fleurs, auprès de qui les nôtres seraient fades,
Croissent sur les rochers comme sur des gradins.
Les Alpes ont leur rose ainsi que les jardins ;
Et tout près de l’horreur des montagnes glacées
Où les sources des eaux sanglotent amassées,
La main du voyageur cueille pensivement
La fleur dont il ne sait rien que l’éclat charmant ;
Celle-là, douce à voir, toute blanche et petite,
Qui plus bas, dans nos prés, serait la marguerite ;
Et de frêles bouquets, braves et pas frileux,
Qui s’ouvrent parmi l’herbe et semblent des yeux bleu
Attrait naïf qui fait que les pas se retardent.

Lorsque vous arrivez, les vaches vous regardent ;
Elles tournent la tête, et l’allongent vers vous.
Assises et ployant sous elles les genoux,
D’autres chassent les taons de leur queue au fouet rude
Et presque tendre, sans montrer d’inquiétude,
Leur prunelle vous suit et vous dit au revoir.

Et, bien plus loin, voici que vous allez pouvoir,
Sans qu’une note reste indistincte ou perdue,
Entendre encor la cloche à leur cou suspendue :
Car aucun bruit d’en bas ne trouble la hauteur.
Sur le rhythme alterné chacune avec lenteur
Sonne, claire à la fois et dans l’ensemble éteinte,