Page:Mérédac - Des histoires, 1932.djvu/122

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

DES HISTOIRES

à ton sourire une telle tristesse, même lorsque tu es joyeuse.

« A te contempler ainsi, une grande détresse m'est venue ; m’est revenue, plutôt, car je l’ai chassée déjà dix fois sans m’en pouvoir affranchir : je te sens si fragile, ma Chérie, si merveilleusement disposée pour souffrir de la vie ! Et voici que m’oppresse cette pensée que je pourrais mourir avant toi !

« Quand deux êtres se sont aimés comme nous nous sommes aimés, la survie doit être un horrible supplice. Pour moi-même, J'y ai souvent médité avec terreur ; mais lorsque j’y songe pour toi, ma Bien-Aimée, cette vision m’est une vision d’agonie.

« Le vide soudain et le noir, le point d’appui qui vous manque, la transfiguration instantanée et presque incompréhensible de votre vie, tout cela doit être atroce ; et plus douloureux encore le réveil, le retour à la pleine conscience après l’a-

116