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de sérieuses réflexions, que le français, aujourd’hui, ne peut pas être une langue internationale, et ils ont cherché à propager un idiome neutre dans le but d’empêcher les peuples voisins de prendre la place officiellement occupée par nous — dans la tradition, beaucoup plus que dans la réalité.

Notre belle langue française a pu, dans les époques de gloire, être adoptée comme la langue officielle[1], de la diplomatie, des cours et de la haute société étrangère, cela est indiscutable ; mais depuis longtemps nous avons dû cesser de revendiquer cet honneur. Rivarol, vivant à notre époque, n’eût sans doute pas écrit son Discours sur l’universalité de la langue française.

C’est donc une légende — et la plus tenace de toutes parce qu’elle flatte notre amour-propre — actuellement il faut en rabattre. Est-ce parce que notre langue a perdu de sa souplesse et de sa clarté ? non certainement ; la raison s’en découvrirait mieux dans l’amoindrissement de notre prestige militaire. La vogue de la langue française a passé — dans les hautes classes qui, seules, l’em-

  1. On a tort de confondre les mots international et officiel. Si notre langue française a été officiellement adoptée à l’étranger pendant une certaine époque, il est certain que ce temps est passé, et ne peut revenir, parce que le but poursuivi actuellement est l’adoption d’une langue à la portée de tous ; et en dehors des côtés politiques de la question aucune langue vivante, ainsi qu’on le verra, ne peut jouer ce rôle.