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pendant la vie ; telle est la fonction qui m’est attribuée pour avoir reconnu, aux siècles anciens, que les sociétés humaines doivent être fondées, non sur la force, mais sur la loi. Quand tes accusateurs viendront ici, tu pourras les accuser à ton tour. Celui qui reconnaîtra ses torts ira se livrer aux Euménides pour être purifié.

Socrate. Crois-tu donc, Minos, qu’Anytos et Mélitos avoueront qu’ils ont été injustes ?

Minos. Je leur montrerai les conséquences de leur action, Socrate. Ils entendront les siècles futurs les condamner à leur tour. Ils verront dans l’avenir des races serviles qui, après avoir inondé la terre de sang innocent, reprocheront encore ta mort à la démocratie d’Athènes. Alors ces hommes qui, en t’accusant, ont cru servir la patrie, seront épouvantés de leur œuvre et appelleront l’expiation.

Socrate. Comment se peut-il, Minos, qu’en accusant un innocent quelqu’un s’imagine qu’il sert la patrie ?

Minos. Tu leur adresseras cette question à eux-mêmes, Socrate, et je sais ce qu’ils te répondront. Ils te montreront les fruits de tes leçons : ton disciple chéri, Alkibiade, donnant l’exemple