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où est votre dernier château de cartes, que je souffle dessus ?

Moi. Ce sera une forteresse contre laquelle s’useront les vieilles griffes du mal : on la nommera le Temple de la justice et de la liberté. Nous ne la bâtirons pas dans les nuages ; nous n’imiterons pas nos pères, qui reléguaient au ciel leurs espérances : c’est la terre qui nous est confiée, nous construirons sur ses bases solides. Nous ne pourrons achever notre œuvre, mais nos fils y travailleront après nous. Notre pensée vivra en eux ; et, s’il y a une autre immortalité plus active, peut-être nous sera-t-elle donnée par surcroît, car le paradis de nos rêves n’est pas une oisive béatitude ; comme les héros scandinaves, nous ne voulons renaître que pour l’éternité du combat. Que notre sang serve d’engrais à la moisson future : il faut que la guerre se poursuive tant qu’il y aura des tyrans et des esclaves, et bienheureux ceux qui pourront briser les dernières chaînes et brûler le dernier trône !

Lui. Vous ne ferez pas même grâce au trône pontifical ?

Moi. Je n’aurais pas cru que vous dussiez regretter celui-là ; est-ce générosité pour un vieil