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temps, et si un homme par sa doctrine et par sa vie a révélé un Dieu aux autres hommes, il en est vraiment l’incarnation. Quand les chrétiens nous disent que le Christ est Dieu et homme à la fois, ils font l’apothéose de la vertu de l’homme, ils traduisent la morale stoïcienne dans la langue mythologique, qui est la langue naturelle des religions, et comme je ne connais rien de plus divin que le sacrifice de soi-même, le Christ a sa place dans mon Panthéon.

Porphyre. N’espère pas, Nouménios, que cette concession satisfasse les chrétiens. Ils ne te regarderont comme un des leurs que si tu renies tous les autres Dieux.

Nouménios. Ce n’est pas une concession et je m’inquiète peu de satisfaire qui que ce soit. Je cherche la vérité et la prends partout où je la trouve. Je vois le divin dans la nature et j’adore, sous leurs révélations visibles, les lois multiples de l’univers. La loi morale est aussi une loi divine, et j’adore la conscience, le Dieu intérieur que chacun porte en soi. Comme la vertu de l’homme ne se manifeste que par la lutte contre les puissances cosmiques, il est naturel que les chrétiens renient les anciens Dieux ; la religion