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M’a tiré de la nuit originelle, ô Mère !
Ton lait m’a nourri, tes bras m’ont bercé.



Je me suis enivré de ce sommeil sans rêve
Que verse aux forêts le vent des hivers,
Et de ce lent réveil du printemps, quand la séve
Couronne les bois de feuillages verts.



J’ai, tour à tour poisson muet dans le flot sombre,
Taureau dans les champs, aigle dans le ciel,
Lion dans les déserts, sous ses formes sans nombre,
Pas à pas suivi l’être universel.



Mille fois retrempée à la source des choses,
Mon âme agrandie, en son vol joyeux,
Par l’échelle sans fin de ses métempsycoses,
Va de l’arbre à l’homme, et de l’homme aux dieux.