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phes. Les procédés de divination n’étaient plus les mêmes, parce que les besoins étaient différents ; les tribus agricoles étaient devenues des sociétés politiques. Tant que les hommes n’avaient eu d’autres intérêts que l’avenir des récoltes, ils avaient interrogé Zeus, c’est-à-dire observé l’atmosphère, et ces observations, imparfaites sans doute, avaient cependant un caractère scientifique. Mais lorsqu’on s’inquiéta surtout du succès d’une guerre, de la fondation d’une colonie, de l’établissement d’une législation, de la conciliation de deux cités ou de deux factions ennemies, il fallut demander au dieu de la lumière de suppléer à l’impuissance de la raison humaine. Entendue ainsi, la divination n’était plus une science, c’était un don des dieux, une inspiration. Les prophètes, les pythies, n’étaient que les instruments passifs du dieu qui les agitait et les possédait :

Bacchatur vates, magnum si pectore possit
Excussisse Deum…

Selon Plutarque, on choisissait pour pythies des femmes simples et ignorantes, plus aptes par cela même à subir sans résistance l’influence divine.

Platon compare dans le Phèdre les diverses espèces de folie envoyées par les dieux ; il attribue le délire des prophètes à Apollon, celui des poètes aux Muses, celui des amants à Éros, celui des initiés à Dionysos. Ces maladies de la pensée qui résultent d’une action divine, lui paraissent supérieures à la sagesse humaine. Quand nous parlons aujourd’hui de l’extase des poètes,