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plaisanteries de Lucien ; c’est comme si on jugeait le christianisme d’après Voltaire.

Le dix-huitième siècle, qui condamnait indistinctement tous les symboles religieux au nom des principes abstraits de sa philosophie, ne comprit pas mieux les religions mortes que les religions vivantes. On admettait alors que tous les cultes étaient des jongleries inventées par les prêtres pour entretenir leur petit commerce aux dépens des dupes. Les plus indulgents se bornaient à dire que les sages n’avaient trompé le peuple que dans de bonnes intentions. Les chrétiens étaient d’accord avec les philosophes dès qu’il s’agissait d’une religion étrangère. En général on essayait d’expliquer la mythologie par l’histoire en cherchant dans chaque Dieu un homme divinisé. C’était l’opinion développée jadis par Évhémère et adoptée par Diodore et par la plupart des écrivains ecclésiastiques. La tentative de Dupuis fut beaucoup plus sérieuse ; il vit dans les religions des symboles astronomiques et les rapporta au culte de la lumière. Cette théorie contenait un principe vrai : il est certain que les divinités solaires sont fort nombreuses dans les religions anciennes, et que l’imagination se représente encore aujourd’hui les personnifications célestes sous forme d’essences lumineuses. Il est vrai que Dupuis fit un étrange abus de son système ; il voulut l’appliquer au chris-