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du Diable dans les légendes rapproche le Christianisme de la religion mazdéenne.

Le Bouddhisme est plus voisin encore du Christianisme par sa morale et sa légende, mais il s’en éloigne absolument par le dogme, puisqu’il offre le spectacle singulier de l’Athéisme érigé en religion. L’histoire intérieure des sociétés bouddhiques n’est guère connue, mais ce qu’on en sait suffit pour montrer que des croyances négatives peuvent s’accommoder du despotisme et de la théocratie. Le clergé bouddhiste se recrute par l’initiation individuelle comme le clergé chrétien ; en étendant ce système à toutes les fonctions publiques, la Chine a réalisé ce rêve des classes lettrées de notre époque, un peuple docile, obéissant avec une régularité ponctuelle à une élite de fonctionnaires éclairés. De là un mélange d’enfantillage et de décrépitude qui fait ressembler la Chine à une école de bambins conduite par des vieillards.

Dans les sociétés chrétiennes, la concordance entre les formes politiques et les croyances religieuses est frappante ; chaque siècle, chaque pays applique les mêmes solutions au problème religieux et au problème social. La divergence de ces solutions s’explique par la diversité des affluents d’où est sorti le grand fleuve chrétien. Par une réaction naturelle contre le Polythéisme vaincu, le côté unitaire du dogme devait prévaloir d’abord, et sur le sol où avaient fleuri les républiques, l’empire byzantin fut le type des monarchies absolues. En occident, au morcellement féodal et à l’autonomie imparfaite des communes répond le culte des Saints, un Polythéisme saupoudré d’unité et réglementé par la théocratie. Ces religions locales disparaissent quand les communes et les provinces sont absorbées dans l’unité des monarchies ; le roi dit : « L’État, c’est moi » ; le prêtre dit : « Dieu seul est grand, mes frères », et la philosophie subordonne à l’arbitraire divin les axiomes de la raison. À la revendication du libre examen des textes sacrés répond, en politique, le système parlementaire ; l’unité du monde est représentée par un Dieu presque abstrait, gouvernant sans miracles au moyen d’une charte, et assez semblable à un roi constitutionnel ou à un président de république moderne. Il faut remarquer que notre système représentatif, même quand le pouvoir central n’est pas héréditaire, n’a rien de commun avec les républiques de l’antiquité, qui avaient pour bases la législation directe et le gouvernement gratuit.


III

DE LA SYMBOLIQUE ET DES FONDEMENTS DE LA FOI


Nécessité de l’Herméneutique.


L’imagination a créé la langue religieuse, la mythologie, comme elle a créé la langue grammaticale. Elle donne aux croyances naissantes la forme