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dans les départemens et à Paris même, ont été destitués et insolemment remplacés par les membres des comités révolutionnaires, tirés des prisons où ils avaient été si justement jetés après le 9 thermidor ; qu’on a poursuivi encore les prêtres avec un acharnement infernal ; qu’au moment où j’écris[1], il y en a encore trente mille périssant de misère dans les prisons, où l’on a la barbarie de les garder après le rapport de la loi qui les persécutait ; que le brigandage exercé contre les parens des émigrés pour l’émigration de leurs enfans, qui n’est pas la leur, et qui ne peut être un délit dans la plupart des émigrés eux-mêmes, chassés par la terreur, se soutient toujours avec la même force et la même indignité ; que deux à trois cent mille rentiers meurent de faim, en voyant consumer et dilapider leurs propriétés, puisqu’enfin ils ont droit de regarder comme telles et la partie de l’impôt qui devait fournir au paiement de leurs rentes, et les propriétés nationales, dont le premier usage et le plus sacré devait être de remplir les engagemens de la nation. Tous ces crimes, encore une fois, tous ces malheurs, ou du moins leur prolongation et leur durée, ont été l’effet naturel et nécessaire du triomphe de la convention dans le projet d’usurper les deux tiers du pouvoir, quand l’assemblée

  1. Vers 1800.