Page:Mémoires inédits de l'abbé Morellet tome 2 1882.djvu/36

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ah ! dit le questionneur, c’était un prieuré. Et qui t’avait donné ce prieuré ? Ils voulaient que je répondisse, le tyran. J’éludai la difficulté en disant que je l’avais eu par un indult du citoyen Turgot, le ministre dont j’avais été trente ans l’ami. Et sur cela je leur expliquai en peu de mots ce que c’était qu’un indult. Au nom de M. Turgot, plusieurs d’entre eux dirent : Oui, c’était un bon citoyen, et le meilleur des contrôleurs généraux que nous ayons eus.

Mon interrogatoire étant fini, on me lut le procès-verbal, dont la rédaction n’était pas malveillante. On me le fit signer, et on me dit de sortir, en ajoutant qu’on allait me rappeler.

On me fit rentrer deux minutes après, la délibération en ma faveur n’ayant pas souffert de difficulté, et n’ayant entraîné aucune discussion. Le président me dit d’un air assez obligeant : Citoyen, le comité est content de tes réponse, tu peux te retirer sans remords. Il voulait dire sans inquiétude, mais je ne m’embarrassais guère du mot propre.

Il était onze heures, il faisait une pluie battante ; il me fallait revenir par des rues désertes, et par les Champs-Élysées, qui étaient une mer de boue. Un des membres du comité, voyant mon embarras, se chargea de me ramener chez moi sous un grand parapluie dont il était pourvu. Je causai avec lui en chemin ; et j’en tirai quelques faits qui me servirent à connaître d’où venait la dé-