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Enfin, monsieur, je vais finir par une proposition qui vous paraîtra peut-être singulière, et que je consens que vous fassiez à M. d’Alembert, si vous le jugez à propos. Vous avez vu dans les fragmens de mon mémoire, que nous avons lu ensemble, que mon principe de liberté n’est pas restreint à la littérature, et que j’incline beaucoup à l’étendre jusqu’à la science du gouvernement, sans même en excepter la critique des opérations du ministère. Je ne suis pas le maître de donner cette liberté aussi entière que je le désirerais sur les autres administrations ; mais, pour la mienne, personne ne peut se plaindre que je l’abandonne. Ainsi, si M. d’Alembert, ou un autre, peut prouver qu’il est contre le bon ordre de laisser subsister des critiques dans lesquelles l’Encyclopédie est aussi maltraitée que dans les dernières brochures, si quelqu’autre auteur trouve qu’il est injuste de tolérer des feuilles périodiques, et s’il prétend que le magistrat doive juger lui-même de la justice des critiques littéraires avant de les permettre, en un mot, s’il y a quelqu’autre partie de mon administration qu’on trouve répréhensible, ceux qui s’en plaignent n’ont qu’à dire leurs raisons au public. Je les prie de ne me pas nommer parce que cela n’est pas d’usage en France ; mais ils peuvent me désigner aussi clairement qu’ils le voudront, et je leur promets toute permission. J’espère au moins qu’après m’être exposé à leurs déclamations, pouvant les