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vers les deux sectes, principes de tolérance purement civile dans les magistrats comme tels, sans être des principes d’indifférence religieuse. Tout cela était parfaitement applicable à nos querelles du moment. Le docteur Tamponnet, dont Voltaire s’est si bien moqué, était censeur de l’Encyclopédie. Il laissa passer tout l’historique ; mais il ne voulut point de raisonnement. Quoique homme de peu d’esprit, il subodora l’application que je voulais qu’on fit aux querelles des jansénistes et des molinistes ; et, en fanatique qu’il était, il refusa absolument d’approuver la deuxième partie : elle ne fut imprimée que sur l’épreuve. D’Alembert et Diderot m’écrivirent à Lyon, où j’étais allé faire un petit voyage, qu’ils avaient fait l’impossible pour fléchir le docteur inexorable. J’ai conservé le manuscrit. Il est curieux de comparer ce qu’on a fait depuis avec ce qu’on demandait alors humblement et d’une manière détournée, et ces mêmes hommes qu’on voulait rendre tolérans, persécutés à outrance, et en butte à une injustice bien plus criante que celle qui soulevait alors tous les bons esprits.

Vers la fin de 1757 et le commencement de 1758, s’agita au conseil de commerce la question de la liberté de la fabrication des toiles peintes en France : elle y était, depuis plus de trente ans, interdite, en même temps que les prohibitions les plus sévères défendaient l’introduction et l’usage des toiles étrangères. On inquiétait les citoyens,