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On ne pardonnera, je crois, de publier à la suite de cette lettre une autre plaisanterie de Francklin, qui confirmera ce que j’ai dit de sa gaîté franche et de l’heureuse sociabilité de son caractère.

Comme il aimait les chansons à boire, presque autant que les chanson écossaises, et que j’en avais fait pour lui, il s’avisa, dans un de ses momens de folie, de m’adresser la lettre suivante.


LETTRE

DE L’ABBÉ FRANCKLIN À L’ABBÉ MORELLET,

Avec figures.

« Vous m’avez souvent égayé, mon très-cher ami, par vos excellentes chansons à boire ; en échange, je désire vous édifier par quelques réflexions chrétiennes, morales et philosophiques sur le même sujet.

» In vino veritas, dit le sage. La vérité est dans le vin.

» Avant Noé, les hommes, n’ayant que de l’eau à boire, ne pouvaient pas trouver la vérité. Aussi ils s’égarèrent ; ils devinrent abominablement méchans, et ils furent justement exterminés par l’eau qu’ils aimaient à boire.

» Ce bonhomme Noé, ayant vu que par cette mauvaise boisson tous ses contemporains avaient