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CHAPITRE IV

Sorèze. — Dom Ferlus. — La vie à Sorèze. — Allures égalitaires. — Premières épreuves. — Visite d’un représentant du peuple.

C’est ici le moment de vous donner un abrégé historique du célèbre collège de Sorèze, tel qu’il m’a été fait par dom Abal, ancien sous-principal, que je voyais très souvent à Paris, sous l’Empire.

Lorsque, sous Louis XV, on résolut de chasser les Jésuites de France, leurs défenseurs prétendant qu’eux seuls pouvaient élever la jeunesse, les Bénédictins, ennemis déclarés des Jésuites, voulurent prouver le contraire ; mais comme il ne leur convenait pas, quoiqu’ils fussent très studieux et très instruits, de se transformer en pédagogues, ils choisirent quatre de leurs maisons pour en faire des collèges. Ce furent entre autres Sorèze et Pontlevoy, dans lesquels ils réunirent les membres de l’Ordre qui avaient le plus d’aptitude pour le professorat et qui, après l’avoir exercé plusieurs années, pouvaient se retirer dans les autres couvents de l’Ordre. Les nouveaux collèges prospérèrent ; Sorèze surtout se fit remarquer, et la foule d’élèves qui y accoururent de toutes parts ayant rendu nécessaire un plus grand nombre de professeurs, les Bénédictins y attirèrent beaucoup de laïques des plus instruits. Ceux-ci s’établirent avec leur famille dans la petite ville où était le couvent, et les enfants de ces professeurs civils, élevés gratuitement au collège en qualité d’externes, formèrent plus