mentaire auprès du roi de Prusse à Graudentz et avait besoin d’un officier pour remplacer son aide de camp qu’il venait d’expédier à Posen avec des dépêches pour l’Empereur. Augereau et Duroc m’avaient choisi parce qu’ils se rappelaient qu’au mois d’août précédent j’avais été en mission à la cour de Prusse, dont je connaissais presque tous les officiers ainsi que les usages.
Je fus bientôt prêt. Le maréchal du palais me prit dans sa voiture, et descendant la rive gauche de la Vistule qu’occupaient les troupes françaises, nous allâmes passer le fleuve dans un bac en face de Graudentz. Nous prîmes un logement dans la ville de ce nom, et nous nous rendîmes ensuite à la citadelle, où toute la famille royale de Prusse s’était réfugiée après la perte des quatre cinquièmes de ses États. La Vistule séparait les deux armées. Le Roi avait l’air calme et résigné. La Reine, que j’avais vue naguère si belle, était très changée et paraissait dévorée de chagrin. Elle ne pouvait se dissimuler qu’ayant poussé le Roi à faire la guerre, elle était la principale cause des malheurs de son pays, dont les populations élevaient la voix contre elle. L’Empereur n’aurait pu envoyer au roi de Prusse un parlementaire qui lui fût plus agréable que Duroc, qui, ayant rempli les fonctions d’ambassadeur à Berlin, était très connu du Roi et de la Reine. Tous deux avaient apprécié l’aménité de son caractère. J’étais un trop petit personnage pour être compté ; cependant le Roi et la Reine me reconnurent et m’adressèrent quelques mots de politesse.
Je trouvai les officiers prussiens attachés à la Cour bien loin de la jactance qu’ils avaient au mois d’août. Leur défaite récente avait grandement modifié leur opinion sur l’armée française ; je ne voulus néanmoins pas m’en prévaloir, et évitai soigneusement de parler d’Iéna et de nos autres victoires. Les affaires que le maréchal