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DÉMORALISATION DES PRUSSIENS.

famille autant que cela dépendait de lui, le bon maréchal Augereau se rendit chez l’Empereur et revint avec l’autorisation de laisser le jeune prince prisonnier sur parole au sein de sa famille, faveur à laquelle le prince Ferdinand fut infiniment sensible.

La victoire d’Iéna avait eu des résultats immenses. La démoralisation la plus complète avait gagné non seulement les troupes qui tenaient la campagne, mais aussi les garnisons des places fortes. Magdebourg se rendit sans même essayer de se défendre ; Spandau fit de même ; Stettin ouvrit ses portes à une division de cavalerie, et le gouverneur de Custrin envoya des bateaux en deçà de l’Oder, pour porter dans cette place les troupes françaises, qui sans cela n’auraient pu s’en emparer qu’après plusieurs mois de siège !… On apprenait tous les jours la capitulation de quelque corps d’armée ou la reddition de quelque place. L’organisation vicieuse des troupes prussiennes se fit alors sentir plus que jamais : les soldats étrangers, principalement ceux enrôlés par force, saisissant l’occasion de recouvrer la liberté, désertaient en masse ou restaient en arrière pour se rendre aux Français.

Aux conquêtes faites sur les Prussiens, Napoléon ajouta la confiscation des États de l’électeur de Hesse-Cassel, dont la duplicité méritait cette punition. En effet, ce prince, sommé quelque temps avant la guerre de se déclarer pour la Prusse ou pour la France, les avait bercées toutes les deux de promesses, en réservant de se ranger du côté du vainqueur. Souverain avide, l’Électeur avait formé un grand trésor, en vendant ses propres sujets aux Anglais, qui les employaient à combattre les Américains pendant les guerres de l’Indépendance, où il en périt un fort grand nombre. Mauvais parent, il avait offert de joindre ses troupes à celles des Français, à