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HOLLABRUNN.

brünn, une forte position qui lui ouvrit la route de Moravie et assurait sa retraite ainsi que sa jonction avec la seconde armée russe, cantonnée entre Znaïm et Brünn. Napoléon était alors au palais de Schœnbrünn, près de Vienne ; il entra dans une grande colère en apprenant que Murat, se laissant abuser par le prince Bagration, s’était permis d’accepter un armistice sans son ordre, et lui prescrivit d’attaquer sur-le-champ Koutousoff.

Mais la situation des Russes était bien changée à leur avantage ; aussi reçurent-ils les Français très vigoureusement. Le combat fut des plus acharnés ; la ville d’Hollabrünn, prise et reprise plusieurs fois par les deux partis, incendiée par les obus, remplie de morts et de mourants, resta enfin au pouvoir des Français. Les Russes se retirèrent sur Brünn ; nos troupes les y poursuivirent, et occupèrent cette ville sans combat, bien qu’elle soit fortifiée et dominée par la célèbre citadelle de Spielberg.

Les armées russes et une partie des débris des troupes autrichiennes s’étant réunies en Moravie, l’Empereur, pour lui donner un dernier coup, se rendit à Brünn, capitale de cette province. Mon camarade Massy et moi le suivîmes dans cette direction ; mais nous avancions lentement et avec beaucoup de peine, d’abord parce que les chevaux de poste étaient sur les dents, puis à cause de la grande quantité de troupes, de canons, de caissons, de bagages dont les routes étaient encombrées. Nous fûmes obligés de nous arrêter vingt-quatre heures à Hollabrünn, afin d’attendre que le passage fût rétabli dans ses rues détruites par l’incendie et remplies de planches, de poutres, de débris de meubles encore enflammés. Cette malheureuse ville avait été si complètement brûlée que nous n’y trouvâmes pas une seule maison pour nous abriter !…