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CHAPITRE XXV

Hollabrünn. — Je remets à l’Empereur les drapeaux pris à Bregenz. — Dangers d’un mensonge de complaisance.

Le maréchal russe Koutousoff de Krems se dirigeait par Hollabrünn sur Brünn, en Moravie, afin de s’y réunir à la seconde armée que l’empereur Alexandre conduisait en personne ; mais, en approchant d’Hollabrünn, il fut consterné en apprenant que les corps de Murat et de Lannes étaient déjà maîtres de cette ville, ce qui lui coupait tout moyen de retraite. Pour se tirer de ce mauvais pas, le vieux maréchal russe, employant à son tour la ruse, envoya le général prince Bagration en parlementaire vers Murat, auquel il assura qu’un aide de camp de l’Empereur venait de conclure à Vienne un armistice avec l’empereur Napoléon, et qu’indubitablement la paix s’ensuivrait sous peu. Le prince Bagration était un homme fort aimable ; il sut si bien flatter Murat, que celui-ci, trompé à son tour par le général russe, s’empressa d’accepter l’armistice, malgré les observations du maréchal Lannes, qui voulait combattre ; mais Murat ayant le commandement supérieur, force fut au maréchal Lannes d’obéir.

La suspension d’armes dura trente-six heures, et pendant que Murat respirait l’encens que ce Russe madré lui prodiguait, l’armée de Koutousoff, faisant un détour et dérobant sa marche derrière un rideau de monticules, échappait au danger et allait prendre, au delà d’Holla-