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MÉMOIRES DU GÉNÉRAL DE MARBOT.

ont passé le Danube à Vienne et ont pris position à Mölk et à Saint-Pœlten. Il est informé en même temps que l’armée autrichienne, commandée par le célèbre archiduc Charles, ayant été battue par Masséna dans le pays vénitien, se retire dans le Frioul par la direction de Vienne ; enfin que l’archiduc Jean occupe le Tyrol avec plusieurs divisions. Ces deux princes menaçaient donc la droite de l’armée française pendant qu’elle avait les Russes devant elle. Pour se prémunir contre une attaque de flanc, l’Empereur, qui avait déjà le corps du maréchal Augereau vers Bregenz, envoie celui du maréchal Ney envahir Innspruck et le Tyrol, et porte le corps de Marmont à Léoben, afin d’arrêter le prince Charles, venant d’Italie.

Napoléon, ayant par ces sages précautions assuré son flanc droit, voulut avant d’avancer de front sur les Russes, dont l’avant-garde venait de se heurter contre la sienne à Amstetten, près de Steyer, prémunir son flanc gauche contre toute attaque des troupes autrichiennes réfugiées en Bohême, sous les ordres de l’archiduc Ferdinand. À cet effet, l’Empereur donna au maréchal Mortier les divisions d’infanterie Dupont et Gazan, et lui prescrivit de traverser le Danube sur les ponts de Passau et de Linz, puis de descendre le fleuve par la rive gauche, tandis que le gros de l’armée continuerait sa marche sur la rive droite. Cependant, pour ne pas laisser le maréchal Mortier trop isolé, Napoléon imagina de réunir sur le Danube un grand nombre de bateaux, pris dans les affluents de ce fleuve, et d’en former une flottille qui, conduite par les marins de la garde, devait descendre en se tenant constamment à la hauteur du corps de Mortier, afin de lier les troupes des deux rives.

Vous allez me trouver bien audacieux d’oser critiquer une des opérations du grand capitaine ; cependant je ne