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SALAMANQUE.

tait de une heure à trois heures pour dîner, faire reposer les mules et laisser passer la forte chaleur, pendant laquelle on dormait, ce que les Espagnols appelaient faire la sieste. Puis on gagnait la couchée. Les repas étaient assez abondants, mais la cuisine espagnole me parut tout d’abord d’un goût atroce ; cependant, je finis par m’y habituer. Mais je ne pus jamais me faire aux horribles lits qu’on nous offrait le soir dans les posadas ou auberges. Ils étaient vraiment dégoûtants, et don Raphaël, qui venait de passer un an en France, était forcé d’en convenir. Pour obvier à cet inconvénient, le jour de mon entrée en Espagne, je demandai à coucher sur une botte de paille. Malheureusement, j’appris qu’une botte de paille était chose inconnue en ce pays, parce qu’au lieu de battre les gerbes, on les fait fouler sous les pieds des mules, ce qui réduit la paille en petits brins à peine longs comme la moitié du doigt. Mais j’eus la bonne idée de faire remplir un grand sac de toile avec cette paille hachée ; puis, le plaçant dans une grange, je me couchai dessus, enveloppé dans mon manteau, et évitai ainsi la vermine dont les lits et les chambres étaient infestés. Le matin, je vidai mon sac, qui fut placé dans la voiture, de sorte que, à chaque couchée, je le faisais remplir et avais une paillasse propre. Mon invention fut imitée par don Raphaël.

Nous traversâmes les provinces de Navarre, de Biscaye et d’Alava, pays de hautes montagnes ; puis nous passâmes l’Èbre et entrâmes dans les immenses plaines de Castille. Nous vîmes Burgos, Valladolid, et arrivâmes enfin, après quinze jours de marche, à Salamanque. Ce fut là que je me séparai, non sans regret, de mon bon compagnon de voyage don Raphaël, que je devais retrouver plus tard, dans ces mêmes contrées, pendant la guerre de l’Indépendance. Le général Leclerc se