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dont on n’a pas revu d’exemple, le baron Haussmann sut rentrer sans plainte dans la vie privée, acceptant toutes les conséquences d’une pauvreté que plus d’un croyait feinte et qui n’était que trop réelle.

En 1870, au lendemain d’un abandon dont il n’a jamais voulu rendre responsable le Souverain qu’il avait servi, au lendemain de la conquête par l’étranger du pays, berceau de sa famille, le baron Haussmann, eut à choisir entre un siège offert à la Chambre Haute d’un État victorieux et une place à chercher dans quelque entreprise d’industrie ou de commerce.

Le baron ne songea qu’à sa patrie, qu’à la province dont il attesterait la fidélité, et, à l’âge de soixante-trois ans, il reprit, — pour employer son expression, — le collier de labeur.

Sans être financier dans le sens pratique du mot, il entendait fort bien les matières de finance. Ses idées économiques étaient nettes, saines, droites. Compréhension vive, discernement parfait, don précieux de la décision, il possédait toutes ces qualités et mettait à leur service une éloquence naturelle allant, sans se hâter, mais toujours au but, à la persuasion.

Les années s’ajoutèrent ainsi aux années.

Le Baron n’était pas, d’ailleurs, sans éprouver certaines déceptions, mais aucune épreuve n’altérait ni la lucidité de son esprit, ni l’égalité de son humeur. À peine sous ses traits impassibles pouvait-on deviner sa résignation.

Vers les dernières années de sa vie, il fut durement frappé dans ses affections par la mort de sa fille, Mme Dollfus, puis un an après par celle de sa femme.

Mais les chagrins n’avaient point altéré sa puissante