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À peu de distance du Puy, on passait la Loire, qui n’est encore là qu’un ruisseau, par le pont de Brives, pour s’engager dans une suite de rampes ardues, en lacets, jusqu’au col de Perthuis, d’où l’on redescendait, par d’autres lacets un peu moins longs, à Bessamorel ; puis à Yssingeaux.

Les piétons et les cavaliers évitaient une partie de ces détours, en suivant des sentiers abrupts, étroits, qu’on appelle, dans le pays, des « coursières » ; mais, il est aussi fatigant de les descendre que de les monter, à cause des débris de pierres volcaniques dont ils sont semés, et qui roulent sous les pas des hommes et des chevaux. Les cavaliers doivent y dévaler à pied, fort gênés par leurs éperons.

Bien que le trajet ne fût que de 28 kilomètres, mon conducteur dut faire reposer ses chevaux, pendant une heure, à Saint-Hostien, sis à moitié route, près de Saint-Étienne-de-Lardeyrol, où se commit, bien des années après, l’assassinat de M. de Marcellange, à l’instigation de sa femme.

Aujourd’hui, le chemin de fer du Puy à Saint-Étienne conduit les voyageurs à Retournac, en 1 heure 5 minutes ; mais, de cette station à Yssingeaux, il reste 14 kilomètres de route, à parcourir en omnibus.

Il faisait nuit close quand nous arrivâmes dans Yssingeaux. C’était un soirde marché. En route, nous avions croisé des paysans, plus ou moins ivres, qui rentraient chez eux. Un grand tumulte obstruait, lorsque j’y parvins, les abords de l’hôtel de la Sous-Préfecture, par suite d’une rixe, où des coups de couteau venaient d’être échangés. Mon premier acte d’administration fut de faire porter à l’hôpital un des combattants, qui gisait