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dévoué, de 1853 à 1870, et reste l’éditeur responsable, dans un pays où l’on personnifie toutes choses.

Mais la postérité, s’il m’est permis d’employer un tel mot, a commencé pour cette entreprise sans exemple. J’en sais mieux juger moi-même aujourd’hui les vraies proportions, les féconds résultats, et aussi, les imperfections, souvent inévitables.

Et puis, le temps m’aurait manqué pour tenir un carnet de mes remarques et de mes impressions.

J’étais, d’ailleurs, et je suis encore, absolument dépourvu de l’instinct collectionneur.

Que de documents, de lettres, de billets, de petits papiers de toute sorte, n’ai-je pas laissés s’envoler à tous les vents, qui posséderaient une valeur inestimable, aujourd’hui

Eh bien ! je ne pensais pas plus à classer, à étiqueter les particularités curieuses des événements auxquels je me suis trouvé mêlé ou dont je fus le témoin.

Placé, à Paris, en dehors de la politique active, par mes fonctions mêmes, auxquelles j’affectai de donner un caractère de plus en plus municipal ; étranger, par nature, et aussi, par prudence, à toute coterie ; absorbé, du reste, par la mission considérable que j’avais reçue et dont je tenais à m’acquitter de mon mieux, je ne cherchais à rien voir ou savoir de ce qui ne me regardait pas. J’allais droit mon chemin, sans m’en laisser volontiers divertir. Ce n’était pas toujours facile ; mais, c’était une règle de conduite très simple, et je la fis mienne.