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Nous ne fûmes pas pillés, du moins par les ennemis. Si ma grand’mére fut volée de tous ses bijoux et de son argenterie, c’est pour avoir pris la malencontreuse précaution de les faire enfouir dans un massif du parc, et fort secrètement, par un jardinier du pays, qu’elle croyait de toute confiance. Quand les alliés se retirèrent, elle courut à sa cachette et la trouva complètement vide. Toutes les recherches opérées pour découvrir le voleur, furent vaines. Mais, elle n’en resta pas moins convaincue de l’innocence de son confident. Suivant elle, on devait imputer le vol à quelque invisible témoin de l’enfouissement opéré.

La Restauration ne pouvait, à beaucoup près, éveiller des sentiments de sympathie dans aucune branche de ma famille. Aussi, le retour de l’île d’Elbe y fut-il salué avec joie. Mais, bientôt, il fallut reprendre les armes et courir à la frontière. Tout le monde partit, même le Maire de Chaville, le vieux Représentant du Peuple, requis par le Ministre de la Guerre, pour donner son concours à je ne sais quelle concentration d’approvisionnements dans le Nord. Les angoisses des femmes recommencèrent.

Après la catastrophe de Waterloo, tous les nôtres revinrent, en plus ou moins bon état. Mon oncle, le colonel Dentzel, avait eu le bras labouré par une balle.

Cette fois, l’invasion étrangère fut moins violente, sinon moins pénible.

Lorsque je me reporte à cette époque terrible, et que j’en évoque les souvenirs, toujours vivants en moi, comme s’ils dataient seulement d’hier, je comprends et