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préparer d’avance, à la Préfecture, pour y recevoir, au besoin, ce renfort.

Le Capitaine, contre lequel on avait essayé de me prévenir, à raison de ses relations, non seulement avec mon prédécesseur, mais, auparavant, avec le Commissaire du Gouvernement Provisoire, se montra digne de la confiance entière qu’après une explication très nette, entre nous, je lui témoignai dans cette occurrence. Mais, je n’ai pas nui, certes, à son avancement : il finit sa carrière comme Général de Brigade, lorsque j’étais Préfet de la Seine.

Quant au lieutenant Morin, un officier à poigne, qui m’accompagna, sans broncher, dans plusieurs expéditions, où sa vie, comme la mienne, tint à peu de chose, je le fis récompenser dignement, comme son chef.

Cent gendarmes valaient bien, ainsi que la suite le prouva, le bataillon de huit cents lignards qu’on m’avait inopportunément retiré. Je pouvais être, en effet, absolument sûr de chacun des premiers, et puis, le chapeau de gendarme exerçait un tout autre prestige que le shako d’un fantassin quelconque, sur les dix mille clubistes de la ville et des bourgs circonvoisins, dont j’avais à prévoir l’attaque dans les « circonstances » où je devrais « me suffire à moi-même », suivant la recommandation philosophique du général Carrelet. Tous savaient, d’ailleurs, qu’outre son sabre et sa carabine, chaque gendarme possédait une arme fort redoutée de cette canaille, comme de la plupart des Provençaux : le procès-verbal.

Mais, jusqu’aux élections de l’Assemblée Législative, fixées aux 13 et 14 mai, je n’eus pas à faire usage de ma réserve inattendue. Il me fallut bien aller, de temps en