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On pensa, je le suppose, que la qualité de Girondin, invoquée par M. Clément Thomas non sans succès déjà, le ferait bien venir à Bordeaux, comme représentant de l’Autorité Centrale, et lui donnerait une certaine influence sur le résultat des élections, remises au 24 avril. Quant à lui, son but, démasqué bientôt, était de poser, dans le département, sa propre candidature à l’Assemblée Nationale, comme en donnaient l’exemple, ailleurs, un très grand nombre de Commissaires du Gouvernement Provisoire…

Il trouva l’occasion de le faire, en prononçant, le 8 avril, un discours-programme des plus modérés, des plus sagement libéraux, et aussi, des plus conservateurs, à la plantation solennelle qu’il prescrivit, d’un « Arbre de la Liberté », juste au centre de l’hémicycle des Quinconces.

Dans une proclamation publiée le 6, à son entrée en fonctions, il avait insisté sur la nature provisoire, essentiellement conciliatrice, de son mandat, et sur la mise en oubli, due à son intervention, des actes du 20 mars, dont, Girondin lui-même, il comprenait et ferait comprendre au Gouvernement le vrai caractère. Mais, le discours politique du 8 constituait une profession de foi. Ne pouvant nier qu’il fût républicain de la veille, il s’efforçait de montrer digne de notre entière sympathie, la République amie de l’ordre, tolérante, respectueuse de tous les droits, presque aimable, dont il se disait l’organe. La religion, la famille, la propriété, rien n’y manquait. Le plus orthodoxe des membres futurs de la réunion, encore à naître, de la rue de Poitiers, n’eût pas mieux dit.

Et il ne s’était pas contenté de convoquer toutes les autorités civiles et militaires : Mgr Donnet, Archevêque