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M. le marquis de La Grange, ainsi que me l’avait dit M. le baron Sers, était un homme charmant, de rapports faciles, agréables. La Marquise, fort grande Dame, le prenant de plus haut, se montrait exigeante, mais bonne, au fond, pour ses amis, quoique son esprit mordant fût toujours en éveil. Nous lui convînmes heureusement tout de suite, ma femme et moi. Jamais, le moindre nuage n’altéra les bons rapports de la Sous-Préfecture avec le château de la Grange, acheté par le Marquis et la Marquise, probablement à cause du nom, aux portes de la ville, sur le fleuve, derrière la Citadelle, près de l’entrée du petit marais. Ils habitaient là, dans l’intervalle des sessions, plus qu’au château que le Marquis possédait dans l’Allier, son pays d’origine.

M. de La Grange, ancien Secrétaire d’Ambassade, s’était intimement lié, dans le cours de sa carrière diplomatique, avec M. de Lamartine, que j’ai vu souvent chez lui, soit avant, soit après 1848, à Paris. Il s’occupait de belles-lettres et de numismatique, et faisait partie de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. Mme de La Grange ne dédaigna pas d’écrire, dans ce milieu, quelques nouvelles pleines de sentiment et de grâce.

Il n’existait pas de sympathie profonde entre elle et les dames Duchâtel ; mais, je pus maintenir toujours en bonne intelligence La Grange et Mirambeau, grâce à mes fréquentes visites chez la Comtesse-Mère, la meilleure personne du monde, qui nous aimait beaucoup, ma femme et moi.

J’appartenais, par ma famille maternelle, à l’Empire, et c’était assez pour cette ancienne Dame du Palais, animée d’un véritable culte pour la mémoire de l’Em-