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sonne. Ses amis savaient, en effet, qu’ils pouvaient venir y prendre place sans invitation, et il était bien rare qu’on n’en vit arriver aucun. Dans tous les cas, seul, aussi bien qu’accompagné, il passait gravement, à l’heure dite, dans sa salle à manger, entre deux haies de valets en livrée, poudrés à l’anglaise. — Il avait rapporté de l’émigration cette habitude. — Son maître d’hôtel lui présentait tous les plats et lui offrait de tous les vins ; mais, il refusait tout, car il ne prenait qu’un potage et des gelées, et ne buvait jamais que de l’eau sucrée. Il quittait la table avec le même cérémonial.

Le service était fait en vaisselle plate, qu’après chaque desserte, des femmes d’office lavaient, rinçaient, repolissaient, et remettaient en ordre dans ses étuis.

Il tenait également, de l’Angleterre, sa passion pour les chevaux. Ses écuries en contenaient toujours nombre de paires, qu’il renouvelait à la moindre tare. Aussi, les maquignons du pays le considéraient-ils comme leur meilleur client.

Sa matinée était consacrée à voir promener ses chevaux, en mains, autour d’une cour de manège. Il réglait, avec son chef d’écurie, l’emploi de tous pendant la journée, trop heureux, quand je descendais chez lui pour faire quelques tournées dans les environs, de me fournir une victoria des mieux attelées.

Lui-même sortait tous les jours à quatre, et passait deux heures à observer son attelage, pour reprendre la moindre faute.

Il réglait de même tous les services de sa maison, avec le chef de chacun. Quand il attendait du monde, il allait visiter, dans tous les détails, les appartements qu’il avait donné l’ordre de préparer, et me di-