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veuvage, épousé, en secondes noces, le général Jacqueminot, Commandant Supérieur de la Garde Nationale de Paris, un ancien frère d’armes de mon oncle, le colonel Dentzel. Je me trouvai donc immédiatement en connaissance avec ce vieux couple, à la grande surprise du Ministre, dont la femme revoyait en moi, soudainement, un compagnon de son enfance et un danseur de sa jeunesse.

M. le vicomte Napoléon Duchàtel, Préfet de la Haute-Garonne, avec qui je venais d’avoir des rapports directs de service, dont il pouvait rendre le meilleur compte à mon grand chef, assistait à ce dîner, avec sa jeune femme, originaire de Toulouse.

On me fit raconter mes pérégrinations en montagne, dans le pays d’ours, — et non pas de loups seulement, — d’où j’arrivais, et après le café, le Ministre et son frère me prirent à part et m’entretinrent du projet de préparer l’élection d’un allié très proche de celui-ci, dans l’arrondissement de Pamiers, où le personnage en question était grand propriétaire. Tout s’expliquait.

Le Ministre, vantant beaucoup la justesse de mes appréciations en matière électorale, désirait qu’avant de prendre le poste qu’il me réservait dans la Gironde, je consentisse à retourner dans l’Ariège, non pas tout de suite, mais vers la fin de l’hiver, sous prétexte de l’internement de l’armée du général Cabrera, qui ne manquerait pas, selon lui, de chercher un refuge en France, par tous les points de la frontière, à cette époque, et, en réalité, pour me ménager l’occasion de visiter l’arrondissement de Pamiers, et notamment les centres protestants où j’avais des amis, et pour juger des chances de réussite de la candidature projetée. Plus tard, M. le vicomte Du-