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sieurs de ses complices furent arrêtés, sans coup férir. — Mon brave Capitaine des Douanes prit sa retraite bien des années après. À sa mort, je m’occupai de sa veuve et de ses enfants. J’aime à consigner ici que cet excellent serviteur s’appelait Goulard.

EXCURSIONS EN MONTAGNE.

Je fis, avec lui, deux grandes excursions. Je crois devoir les raconter, parce que l’une, très difficile, périlleuse même, fut des plus intéressantes, et que l’autre, beaucoup moins laborieuse, et divertissante en somme, se distingua par un incident curieux.

La première fois, nous avions campé, non loin du col de Girette, au pied du mont Vallier, entre l’Étang-Rond et l’Étang-Long, plus rapproché de la frontière : couchés sur l’herbe dans des sacs de douaniers, en peaux de mouton ; la tête et les épaules enveloppées de nos manteaux ; ayant, pour oreillers, les selles de nos chevaux au pacage, — avec des entraves aux pieds de devant, — et gardés par des feux qu’entretenaient les vigies prises, à tour de rôle, dans une escouade de préposés, qui nous servit d’escorte jusque-là. Cette manière de passer la nuit commençait à ne plus m’étonner.

Après une journée d’inspection de la frontière, qui nous avait conduits dans ces parages, nous voulions, le lendemain, non pas descendre en Espagne, mais, au contraire, escalader et suivre, aussi loin que cela nous serait possible, les crêtes de la sierra qui part du mont Vallier pour aller à la Maladetta, afin de voir, de ces hauteurs, les points d’où la Garonne et la Noguera-