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suivre, des lieux de fabrique à Toulouse, les expéditions d’armes et de munitions, et de les signaler d’avance.

Je ne saurais détailler toutes les captures ainsi faites ; mais, je veux mentionner celle d’un convoi de 1,000 fusils, pour avoir l’occasion de rapporter la réponse que me fit, en cette circonstance, le Capitaine des Douanes de ma résidence. Je le prévins de ce convoi, déjà parvenu sur un point hors zone que je lui désignais. Obligé de renoncer aux chemins d’usage, trop bien gardés, il devait nécessairement passer, à dos d’homme, par les revers boisés de telle chaîne de montagnes, pour gagner de proche en proche, la nuit, tel ou tel port d’accès abrupt. Il calcula qu’il fallait cent contrebandiers au moins pour cette entreprise aventureuse, et me dit qu’il ferait embusquer dix hommes, commandés par un brigadier, sur chacun des deux seuls points par lesquels la caravane, une fois entrée dans la zone de douane, pouvait être dirigée. — « Dix hommes, » m’écriai-je ; mais il convient que je fasse appuyer chaque embuscade par un détachement d’Infanterie, ou, tout au moins, par un bon renfort de Gendarmerie, en cas de lutte. » — « C’est inutile, Monsieur le Sous-Préfet, » me répondit-il, « dix hommes, qui font leur devoir, sont plus forts que cent qui font la fraude. »

Les choses se passèrent comme il le prévoyait. Le convoi tomba dans une de ses embuscades. À la première sommation du brigadier, tous les porteurs de fusils se débarrassèrent de leurs fardeaux et décampèrent dans toutes les directions, suivis des hommes d’escorte, qui n’essayèrent même pas de forcer le passage, ne sachant point, du reste, à combien de nos braves douaniers ils avaient affaire. Le chef de l’expédition et plu-