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Je me couchais tard, n’ayant jamais eu besoin de beaucoup de sommeil, et quand je m’éveillais, la nuit, j’allumais une petite lampe portative, et je lisais, pour me rendormir, les Mémoires sur l’Histoire de France, — toute la collection finit par y passer ! — ou bien j’écrivais, au moyen du papier et du crayon placés toujours à portée de main, quelque chose dont l’idée me venait.

Au dehors, j’entretenais des relations suivies avec les familles qui, presque toute l’année, habitaient leurs prétendus châteaux, sis à plus ou moins grande distance de Nérac, dont l’installation, dépourvue de tout luxe, en général, ne présentait guère plus de confortable.

Pendant mes tournées, je prenais gîte dans des résidences lointaines, ou j’étais toujours le très bienvenu. De là, je rayonnais aux alentours, suivant les exigences de mon service. Je trouvais, chez mes hôtes, des habitudes plus policées que chez les citadins, et souvent, des soirées agréables ; car ma présence devenait ordinairement l’occasion d’accroître le cercle de la famille, d’invités de ma connaissance.

Mais, en ville ou bien ailleurs, me souvenant de la recommandation, si sage, du tant regrettable Casimir Périer ; la généralisant même par excès de prudence, je me montrais toujours empressé, galant au besoin, près des Dames, vieilles ou jeunes, laides ou belles, ennuyeuses ou spirituelles. Je savais que cette moitié du genre humain mène l’autre à petit bruit, et que, si je parvenais à la mettre de mon côté, j’aurais grande chance de voir fort affaiblies, tout au moins, les mauvaises dispositions politiques ou purement administratives, rencontrées dans le sexe fort.