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le plan et l’élévation générale de cet édifice bien moderne, conçu par mon Auguste Maître, tel qu’on le voit !

Oui, le Préfet de la Seine de l’Empire était un administrateur doublé d’un artiste ; épris de toutes les grandes choses ; facilement séduit par l’harmonie des vastes ensembles ; ravi par cette poésie de l’ordre et de l’équilibre, qui nous émerveille au spectacle du firmament ; passionné pour le Beau, cette forme excellente, artistique, du Bien, et considérant beaucoup du reste comme secondaire ; mais sachant, par expérience, que les choses secondaires ne sont pas à négliger. Elles jouent, au fond, dans ce Monde, le rôle le plus considérable, en ce sens qu’elles nous enserrent de toutes parts : dès lors, il nous faut, non seulement, en tenir compte, de gré ou de force ; mais encore, y consacrer tout le soin qu’elles méritent.

En résumé, le titre de membre de l’Institut est le seul qui me reste. Pardon !… je dois à l’indulgence, toujours extrême pour moi, de l’Empereur, d’être, depuis le 7 décembre 1862, un des « Grands Dignitaires » de l’Ordre de la Légion d’Honneur, où je suis entré, très jeune Sous-Préfet, comme Chevalier, voilà bien plus d’un demi-siècle, et de voir mon nom inscrit, en vertu d’un décret impérial, rendu, malgré mes objections prévoyantes, sur les plaques du boulevard Haussmann, où la ferme résistance, que je ne saurais oublier, de tous les Chefs de l’État, aux votes réitérés du Conseil Municipal républicain, l’a maintenu jusqu’à présent.

Quant à mon pays, je l’ai servi près de 40 ans, du 22 mai 1831, au 10 janvier 1870. — La République,