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Empire, et qui devait traverser Casteijaloux et Houeillès, (encore deux de mes chefs-lieux de canton), n’existait toujours que sur le papier, comme la route départementale projetée d’Agen à Nérac. Quant aux chemins vicinaux, tous se trouvaient à l’état de sol naturel, c’est-à-dire : à peu près impraticables.

Ces révélations me firent l’effet d’autant de douches d’eau froide. Je sortais d’un pays réputé sauvage, mais sillonné de routes nombreuses, bien entretenues, et possédant une voirie vicinale passable, et je venais administrer un prétendu pays de Cocagne, presque dépourvu de moyens de communications ! L’idée me passa par la tête, de retourner à Paris, pour y dire : « J’aime mieux autre chose » ; mais je réfléchis que, plus j’aurais à faire dans ce pays arriéré, plus il serait méritant de l’entreprendre et de le mener à bonne fin. Et sept ans après, — car je ne restai pas moins de sept ans à Nérac, — dans ce même arrondissement, complètement transformé par mes soins, on circulait partout en voiture et la valeur du sol entier se trouvait considérablement accrue

Je dînai dans la famille du Préfet. Le soir, quelques visites lui vinrent, entre autres, celle de M. le comte de Raymond, Maire d’Agen, avec qui je fus charmé de faire connaissance. Homme de très bonnes manières ; bienveillant ; fort bien posé dans sa ville, dont la haute classe était cléricale et légitimiste, il exerçait, parmi toutes, une action modératrice d’excellent effet. Sa plus jeune fille, toute petite alors, épousa M. Gavini de Campile, Préfet de l’Empire, et, depuis, Député de la Corse.

Le lendemain, je devais déjeuner chez le Général. Auparavant, je mis des cartes aux domiciles des Con-