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apparence aucun canal d’écoulement et qu’elles offrent des degrés de température fort différens, suivant l’endroit où l’on fait les expériences, ce qui y indiquerait la présence d’eaux ou au moins de vapeurs chaudes, probablement sulfureuses. Le manque total de scories de lapillis ou de basalte vient achever la singularité de ce lieu peut-être unique en Europe, car tous les autres cratères-lacs, connus dans ce continent, sont entourés de roches plutôt basaltoïdes ou du moins de tufas associés au trachyte. »

Au-dessus du bord de ce vaste entonnoir il y a au sud-est une espèce de petit plateau qui est occupé par un sol si marécageux que le bétail même n’ose s’y hasarder ; c’est évidemment une ancienne bouche cratériforme ou une mare qui s’est comblée petit à petit, et qui à une demi-lieue de circonférence.

En se dirigeant du lac Sainte-Anne à l’est, on arrive à la solfatare du mont Budos-Hegy (montagne puante), dont l’odeur frappe l’odorat à une grande distance, et qui est sur la même ligne que le lac et la mare. Chemin faisant, on revoit du grès carpathique.

Le mont trachytique de Budos-Hegy n’a pas de formes bien prononcées ; couvert de bois de bouleau et d’orme, il offre sur sa face méridionale des roches dénudées et crevassées ; elles paraissent surtout traversées par une fente courant du nord-ouest au sud-est, dont s’échappe la plus grande masse des vapeurs hydro-sulfureuses chaudes, et extrêmement suffocantes, ce qui y produit des érosions et par suite des cavernes plus ou moins grandes. Le trachyte rouge ou gris, çà et là un peu ponceux, à mica et amphibole, en est décoloré ; son mica ou son amphibole en sont attaqués et blanchis, ou rougis, ou désagrégés ; des taches y marquent simplement la place des cristaux d’amphibole, et la pâte de la roche devient une masse d’alunite. Les roches sont même couvertes d’efflorescences d’alun. Une chandelle ne peut pas brûler dans la plus grande caverne, qui a 2 toises de hauteur et 20 pas de long. Des incrustations et des cristallisations de soufre les couvrent presque toutes, et la température du sol est assez élevée pour que la chaussure en soit attaquée.

Il est probable que dans cette fente volcanique l’hydrogène sulfuré est accompagné du dégagement d’acide carbonique ; aussi voit-on au pied de la sommité de la montagne, sur un petit plateau, sourdre une quantité de sources très acidules, hydrosulfureuses et ferrugineuses. Elles ont couvert une partie de ce lieu d’épaisses incrustations de tuf calcaire ferrugineux, plus ou moins compacte, et renfermant des feuilles, d’autres productions végétales, ainsi que des hélices, des physes, etc. Le sel marin se trouve dans l’une de ces sources, qui, à cause de cela, est recherchée par le bétail, et entourée de plantes salines. Ces eaux minérales précieuses sont presque perdues pour le pays, parce que personne n’a encore pensé à bâtir une maison dans ce lieu sauvage. Néanmoins, des malades viennent de temps en temps camper sous des cabanes de feuillages, soit pour boire les eaux, soit pour s’exposer aux vapeurs sulfureuses des cavernes.