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d’éruption, on ne saurait donc opposer la continuité des assises et l’absence d’affleurement qui témoignent du rayonnement des laves autour du cratère. D’ailleurs cette continuité pourrait exister sans rien prouver contre l’hypothèse d’un cratère d’éruption. Les observations que MM. C. Prévost et Fr. Hoffmann ont faites dans l’Atrio del Cavallo, moderne éboulement du Vésuve, ne permettent pas de douter que l’alternance des laves et des tufs en assises régulièrement stratifiées ne soit un phénomène propre aux cratères d’éruption. J’aurais également cité le Val del Bove à l’Etna, et l’ancien cratère de l’île Bourbon, si l’on n’avait regardé quelquefois ces localités comme des cratères de soulèvement.

La forme et la disposition des vallées sont d’une grande importance dans cette question ; aussi MM. Dufresnoy et de Beaumont ont-ils fait ressortir avec soin toutes les apparences favorables à leur hypothèse. Les distinctions qu’ils ont établies entre le mode de formation des diverses vallées extérieures, entre la composition des vallées intérieures et extérieures, sont singulièrement spécieuses. Nous allons voir jusqu’à quel point elles sont fondées, et d’abord occupons nous des deux grandes vallées de Vic et de Mandailles, qui, partant au nord-est du nœud de Bataillouse, sillonnent parallèlement tout le cratère et vont sortir au sud-ouest par des gorges étroites et profondes. Ces gorges seraient les barancos ou crevasses de déchirement, résultat obligé de l’extension de surface qu’aurait produit l’épanouissement du cône par une force centrale. Mais quand on réfléchit à la nature et à la grandeur du phénomène, il est difficile d’admettre que le cône primitif ne se soit déchiré dans toute sa hauteur que suivant deux arêtes si rapprochées l’une de l’autre. On compare les effets résultant du développement de la force expansive à l’étoilement produit sur une bouteille par un choc léger. Or, cette cassure rayonnée ne se retrouve pas dans le Cantal. Il est juste de remarquer qu’aux gorges par lesquelles s’échappent la Cère et la Jordanne, semblent correspondre à l’autre extrémité des vallées les cols de Cabre et de la font de Cère. Mais ces échancrures sont peu profondes et tellement élevées, qu’elles forment les points de partage des eaux entre les pentes du nord et celles du sud. Il me semble donc que les conditions de la théorie ne sont pas remplies.

Lorsque des principales sommités on promène ses regards sur les flancs du cône, on est frappé tout d’abord d’une sorte de convergence des vallées vers le centre du cratère ; mais un examen attentif des lieux et de la carte fait bientôt apercevoir que cette convergence n’a pas lieu vers le centre, mais vers un axe qui part du Plomb, porte les montagnes du Lioran, de Bataillouse et de Peyrearse, et va rejoindre le Mary. C’est de cet axe que descendent toutes les eaux principales, la Jordanne, la Cère, l’Alagnon, la Rue, le Mars, la Marone, le Brezons, le Près. Cette disposition des vallées n’est point particulière au Cantal ; elles sont ainsi distribuées autour de tous les axes et les nœuds de montagnes. Toutefois elles offrent ici une particularité remarquable : c’est la grande profondeur de quelques unes de ces vallées à leur origine ; elles ne sont séparées du