Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome V 1923.djvu/96

Cette page a été validée par deux contributeurs.
93
MORT DE MADAME ADÉLAÏDE

ment, puis l’inquiétude se montra, son bon esprit sembla s’éclairer.

Mais, en remarquant un extrême aspect d’épuisement dans toute sa personne, je craignis de la trop fatiguer et je m’arrêtai.

Je lui adressai, en me retirant, les compliments d’usage à la fin de l’année et je la priai de vouloir bien être mon interprète auprès du Roi, l’impossibilité où j’étais de marcher ne me permettant pas d’aller le soir au salon lui offrir personnellement mes hommages.

« Mais, non, pas du tout… pas du tout… ma chère, me dit-elle, le Roi serait très fâché de ne pas vous souhaiter la bonne année. Venez ici lundi ; vous l’attendrez aussi longtemps qu’il le faudra. Je le ferai prévenir de votre présence ; il viendra certainement dès qu’il pourra… Mais j’y pense, mieux… Venez mercredi. Toutes ces ennuyeuses fonctions de Cour seront finies, il sera plus libre. Et puis, voyez-vous, ma chère madame de Boigne, nous serons sortis de cette déplorable année 1847 ; je la déteste, et j’aspire à en voir la fin. »

Hélas ! le vœu de cette pauvre princesse ne devait pas être exaucé. Ce sont les dernières paroles que j’ai recueillies de sa bouche.

En sortant de son appartement, je me fis porter chez la Reine. Cette visite ne me laisse aucun souvenir intéressant. Il fut seulement question des affaires Mortier et Praslin et surtout des inquiétudes de la Reine sur l’état de sa belle-sœur.

J’ai appris depuis que, le lendemain, madame de Montjoie avait interpellé la marquise de Salvo, en lui demandant si j’étais tombée dans un état complet de radotage.

« Figurez-vous, ma chère enfant, que notre amie madame de Boigne est venue hier chez madame Adé-