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MORT DE MADAME ADÉLAÏDE

aussi fort troublée dans la famille. Madame la duchesse d’Orléans, déjà très peinée d’avoir vu s’évanouir devant elle le rôle de régente qu’elle avait rêvé tout d’abord, était plus justement courroucée de s’être vu enlever la disposition de la fortune de monsieur le comte de Paris.

Le Roi se l’était réservée, en se chargeant des dépenses de la maison des jeunes princes et de leur mère. Elle en était fort ulcérée et s’était entourée des protestants les plus actifs et les plus prosélytants pour s’en faire un parti.

Elle attirait aussi les représentants de l’opposition libérale et cherchait à entrer en communication, plus ou moins ostensible, avec leurs chefs.

Monsieur le duc d’Aumale avait eu beaucoup de peine à obtenir du Roi l’abandon d’une faible partie de sa propre fortune et n’y était parvenu qu’en mettant à ce prix le consentement à son mariage.

Monsieur le prince de Joinville avait eu permission de jouir de la dot de sa femme, mais elle n’était pas encore liquidée.

De sorte que tous ces princes éprouvaient un certain malaise pécuniaire leur paraissant fort maussade. Sans doute, le Roi croyait agir en très bon père de famille.

Il pensait gérer mieux qu’eux les biens de ses enfants et voulait arriver à l’extinction des dettes et des charges, afin de remettre leurs fortunes tout à fait libérées entre leurs mains ; mais il se montrait trop sévère et ne faisait pas suffisamment de concessions à leur position.

On avait bouleversé le palais des Tuileries pour préparer, au premier étage, un magnifique appartement à l’infante héritière présomptive du trône d’Espagne.

Cela était fort naturel ; mais la princesse de Joinville et la duchesse d’Aumale, reléguées toutes les deux dans