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MORT DE MADAME ADÉLAÏDE

Monsieur le duc d’Orléans avait dit : « Montpensier est de nous tous celui qui a le plus d’esprit et le moins de cœur. » Il l’avait bien jugé.

Toutefois, son mariage, précisément par ce qu’il avait de plus fâcheux, c’est-à-dire à cause de l’humeur qu’il occasionnait en Angleterre, ne laissait pas d’être populaire chez nous. Monsieur Guizot fut enivré de ce succès et le public y applaudit. Les fêtes furent nombreuses et très belles.

Je n’assistai à aucune. Mon âge et l’affaiblissement de ma santé m’autorisaient à renoncer au grand monde. Je m’étais déjà dispensée des réceptions et des bals des Tuileries. Je réformai encore les concerts et les soirées invitées chez monsieur le duc de Nemours qui avait ouvert sa maison en remplacement de celle de monsieur le duc d’Orléans.

Je continuais à voir souvent la Reine et madame Adélaïde, et, de loin en loin, madame la duchesse d’Orléans, le matin. J’allais assez fréquemment prendre place près de la table ronde où la Reine et les princesses travaillaient tous les soirs.

C’était l’occasion de voir le Roi, quelquefois de causer avec lui et d’apprécier les princesses belles-filles qui m’inspiraient assez de curiosité.

Madame la duchesse de Nemours, dans tout l’éclat de sa splendide beauté, était toujours assise à la droite de la Reine, travaillant assidûment, levant à peine les yeux, rendant à la Reine mille petits soins officieux, enfilant ses aiguilles, relevant ses pelotons avec empressement.

Elle en était remerciée avec une affectueuse tendresse, prouvant la place qu’elle tenait dans le cœur de la Reine. C’était, en effet, la plus aimée. Elle le méritait, car elle était aussi bonne qu’elle était simple et belle.

Lorsqu’il n’y avait pas de princesse étrangère, la place