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MORT DU DUC D’ORLÉANS

et l’on faisait le tour de l’église à pas lents pour ressortir par celle de droite.

Cette procession durait sans interruption depuis six heures du matin jusqu’à la nuit, sans le plus léger tumulte, sans le moindre désordre, sans se croiser, sans se heurter, obéissant aux signes muets des agents placés pour la diriger. On m’a raconté que cela était également imposant et touchant. Je n’ai rien vu par moi-même de ces cérémonies.

Ainsi que le jour de l’ouverture des Chambres, monsieur le duc de Nemours obtint un suffrage général. On remarqua la bonne grâce et la dignité de son maintien en montant à l’absoute, et son abattement, sa profonde tristesse, son excessif changement excitaient d’autant plus de sympathie qu’on s’y attendait moins, accoutumé qu’on était à lui voir une physionomie à peu près impassible.

Il faut ajouter que les personnes appelées par situation à causer avec ce prince, dans ces premiers moments, lui reconnurent une grande justesse d’esprit et un jugement fort sain.

Il comprenait sa nouvelle situation et l’acceptait avec un amer chagrin, mais sans découragement. Jamais on ne put surprendre en lui une étincelle d’ambition personnelle ; il n’apercevait que de pénibles devoirs à remplir dans la haute position que la mort venait de lui faire.

Le mardi 2 août, le corps de monsieur le duc d’Orléans fut transporté de Paris à Dreux, accompagné de ses frères. Le Roi s’y rendit de son côté, pour recevoir ces tristes dépouilles du fils dont, à juste droit, il était si fier, et leur donner la dernière sépulture.

La rentrée du Roi et des princes à Neuilly, au milieu de la nuit, leur réception par les tristes princesses qui,