Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome V 1923.djvu/309

Cette page a été validée par deux contributeurs.
306
MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

de monter. C’était lui, en effet, et pas trop mal fagoté ; il avait été à la library, chez la marchande de modes et dans deux ou trois autres maisons sans être reconnu. Le général en a été parfaitement la dupe dans les premiers moments. Il est question de le faire aller au bal dans ce costume ; cela me paraît bien ridicule, surtout dans un bal de souscription où il y a des gens de toutes les espèces ; beaucoup regarderont cette mascarade comme fort impertinente et d’autres se croiront autorisés, par cet exemple de la société qui donne le ton ici, à se passer toutes les frolics que la vulgarity and bad breeding peuvent inspirer. Je ne serais pas étonnée qu’un pareil déguisement rendît ces bals de si mauvaise compagnie qu’il fût impossible d’y aller ; au surplus, cela ne me regarde pas et je n’émets mon opinion que sur le papier. — Lady Elisabeth a passé toute la semaine à faire des recrues pour le bal avec une ardeur vraiment française ; j’espère qu’elle réussira mieux que la dernière fois. C’est un vœu désintéressé car je ne crois pas y aller. — Lady C. m’a raconté que Corisande avait beaucoup de succès à Devonshire house, qu’elle allait à Chatoworth avec sa mère et qu’on espérait que monsieur les y rejoindrait. Cela ne durera pas. — Adieu mes bons amis ; l’heure me presse et la marée n’attend pas.



Bognor, mercredi 24 septembre.

C’est en vain, mon cher papa, que je travaille depuis hier à découvrir le mot de l’énigme : je l’ai apprise par cœur, je l’ai répétée, répétée, retournée, examinée, rien ! Mon esprit est tout à fait bouché ; au surplus, cela ne m’étonne pas ; je n’ai de ma vie trouvé le mot d’une énigme,