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CORRESPONDANCE

pareille chose. — Je suis étonnée que madame de Guiche ne soit pas venue chez vous, mais je n’en suis pas fâchée ; tout ce qui tend à nous éloigner de la clique me convient fort. Ces volontiers, le but de tant de mauvaises plaisanteries, prouvent cependant qu’ils ne sont pas inutiles ; il me semble que, tant qu’ils préserveront leur loyalty, les émeutes populaires ne sont pas à craindre pour ce pays ci. — Benelli est-il parti ? J’espère que oui. — Faites ma paix avec Sapio, maman ; il faut qu’il vienne chez moi le lendemain de mon arrivée. Lady Mary chante comme un ange ; elle a gagné tout ce que j’ai perdu, et la différence est maintenant fort à mon désavantage. — Adieu, ma bonne maman ; je vous charge de cette grande négociation : ménagez le plus possible tous les amours-propres.



Hothampton Crescent, vendredi.

Ma recette d’hier n’a pas trop bien réussi ; mes spirits ne sont pas beaucoup meilleurs ; mais il faut vaincre la tristesse que j’éprouve. Je donnerais beaucoup, depuis quelques jours, pour ne pas connaître une seule personne ici : je n’en vois guère, mais c’est encore trop. — Cette madame Nightingale est partie hier ; elle a dîné chez moi la veille ; il fallait bien lui rendre ce qu’elle nous avait donné. La drôle de femme ! Elle m’a fait toutes les confidences de tous les genres que vous pouvez imaginer. En vérité, maman, je trouve cette rage de paroles bien dégoûtante. Une nouvelle famille, de nouveaux voisins, j’ignore absolument qui c’est et je ne m’en soucie guère. — Hier, on m’a pressée d’aller au bal, mais je m’en suis défendue de mon mieux. Je crois qu’il a dû être brillant : lady Elisabeth a passé toute la semaine à recruter ; elle