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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

mes chevaux et de mes voitures, car mon intendant et mon architecte auraient pu suffire sans les conseils de ma dame. Assurément cet homme, qui avait soutenu la misère avec une espèce de force d’âme, n’a pas su résister à l’écueil de la prospérité. Je crois que ma dame a bien souvent souhaité les « fragments sur le siège de Sion », au feu, et leur auteur au… ; mais je vais dire quelque chose de mal ; il vaut mieux me taire. — Je pourrai, quand vous voudrez, vous servir de baromètre. Mandez-moi si cela peut vous divertir et je vous dirai exactement le temps qu’il fait à Bognor, ou, du moins, à Felpham, car c’est tout ce que je sais de ce qui s’y passe. — À propos, j’ai monté Carina trois fois ; elle ne va pas mal, mais elle a peur des vagues. — Dites à Foster d’aller chez Buhot lui commander une paire de souliers comme les derniers qu’il m’a faits. — Le général ne se décide pas à entrer dans l’eau par la tête, ni même par les pieds.

Je ne sais comment mon bavardage m’a conduite jusque dans les ends, où il ne me reste plus qu’à embrasser ma bonne maman, et à lui souhaiter une vie moins monotone que celle de son enfant, mais non point un meilleur feu que celui au coin duquel je vous écris.



Felpham, lundi 25 août 1800.

J’ai reçu hier un petit billet de maman rempli d’inquiétude, de reproches et de chagrin. Je ne conçois pas comment mes lettres ont pu manquer, mais je suis fâchée que maman m’accuse de négligence. Je ne reçois mes lettres qu’en envoyant celles que j’écris à la poste, parce qu’elle est à un mille et demi de Felpham et que cela évite deux voyages. Il serait possible qu’on eût manqué