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CORRESPONDANCE

Munich, lundi 8 avril.

Je vous disais hier, chère maman, que je vous écrirais plus longuement aujourd’hui ; mais je ne crois pas que je le puisse, car je suis toujours très souffrante. Je vous mandais que monsieur de Boigne partait mercredi prochain pour Vérone et que je ne savais trop à quoi me résoudre. Ayant donc pris conseil de mon oreiller à défaut de cet esprit sage que je désirais hier, je me suis décidée à le suivre. J’en ai déjà parlé, et l’on m’a refusée. Mais, comme je vois qu’il vaut mieux que j’y aille, je ne compte pas me rebuter. Après vous avoir quittés, mes adorés amis, y a-t-il quelque chose qui puisse me coûter ? Et, puisque j’ai suivi monsieur de Boigne jusqu’en Fionie dans la saison où j’y ai été, je puis bien faire cent lieues de plus pour qu’il n’ait point à dire que je l’ai quitté et que je n’ai point voulu aller voir ses parents, ce à quoi il ne manquerait pas, quoique lui même, je crois, se dispenserait très volontiers de ma présence. J’ai fait la condition que je ne partirais que lorsque j’aurais reçu des lettres d’Angleterre, ce qui sera probablement jeudi. Adieu, chers et uniques amis. Mon cœur est bien gros, bien navré. Mille choses à cet excellent abbé ; j’ai bien regretté son bon esprit depuis quelques jours.


Mardi 9.

Il est arrangé que je partirai, à condition cependant que je n’irai que jusqu’à Innsbruck où j’attendrai monsieur de B. qui sera huit jours absent : ce serait déjà quelque chose que ce gain de temps. Une autre chose me déterminerait à partir, c’est ma situation vis-à-vis de madame l’Électrice, ayant refusé d’aller chez elle tant que j’aurais d’aussi vifs sujets d’inquiétude sur la santé de maman ; il paraîtrait extraordinaire que, restant ici encore trois