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CORRESPONDANCE

ne peut pas même intéresser la curiosité. Depuis que je vois des vilains pays, il n’y en a point à comparer avec la Fionie : de Middeljart à Odense, nous avons traversé trente-six milles de pays sans voir un village, un arbre, pas même une maison pour changer de chevaux, les mêmes nous ayant traînés tout le temps. Du reste, la neige ne manque pas dans cette plaine éternelle dont les propriétaires ne doivent pas beaucoup connaître le luxe assurément.

L’idée que je serai encore si longtemps sans recevoir de vos nouvelles, puisque je ne peux pas espérer d’en avoir avant d’arriver à Copenhague, m’afflige à un point que vous comprendrez facilement, puisque c’est ma seule consolation dans la triste situation où je me trouve et dont je voudrais bien vous faire le détail, ce qui est impossible. À cette fois suffit que, avant-hier matin, monsieur de B. m’a donné un bon coup de poing devant quatre témoins, que, depuis ce temps, nous n’avons pas échangé une seule parole. Ne croyez pas, cependant, que j’en sois du tout malheureuse, car, le moment de colère passé, j’ai vu immédiatement l’avantage qu’une pareille action me donnait sur lui. Au surplus, vous recevrez les détails par quelque voie aussitôt que cela sera possible. Je crois qu’on rachèterait chèrement la sottise faite. — Adieu, mes excellents amis ; ne me plaignez pas ; je ne m’ennuie, en vérité, pas beaucoup. Je vous embrasse et je ferme ma lettre. Adieu, encore adieu.



Nyborg, vendredi 17 janvier.

Quoiqu’à Nyborg, je ne suis pas plus rapprochée du but de mon voyage, ma chère maman, et les glaces