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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

passe à Aarö. Eh bien, mon ami, ce passage est changé : on l’a transféré à Snoghorg d’où l’on va à Middeljart, en Fionie. — Je me flatte, mon cher Rainulphe, que tu m’as suivie dans mon voyage jusqu’à Schleswig, par Itzehoë et Rendsburg (situé sur l’Eyder et très bien fortifiée) ; apprends que, de là, nous avons été à Flensburg en laissant Gottorp à notre droite. Flensburg a un excellent port et c’est là que l’on construit et que l’on frète tous les vaisseaux destinés au cabotage de la Baltique. La ville, quoique très petite, est, dit-on, fort commerçante. — Jusqu’à Apenrade, le pays est affreux, mais, depuis ce petit bourg situé dans une position délicieuse, la campagne (jusqu’à Kalding, par Hadersleben) paraît bien boisée et charmante. Au surplus, je n’ai plus guère de sensations d’aucun genre, si ce n’est pour vous aimer tous plus que jamais, car tout en moi est gelé ! je ne saurais te faire comprendre à quel point j’ai froid, mon cher Rainulphe, à moins que tu ne te rappelles le Saint-Gothard. — Je me flatte que papa et maman auront reçu deux lettres de moi depuis que j’ai quitté Hambourg, l’une de Itzehoë et l’autre de Schleswig, mais la mer rend les correspondances si peu exactes qu’il est presqu’impossible de tenir un compte fidèle des lettres qu’on reçoit. — Je ne doute pas, mon ami, que tu n’aies cherché à être encore meilleur garçon depuis mon départ : redouble tes soins pour consoler nos excellents parents. Mon cher Rainulphe, je te promets que, si je suis assez heureuse pour être auprès d’eux quand les soins de l’état que j’espère te voir embrasser t’en éloigneront, je n’épargnerai rien pour adoucir un chagrin aussi cruel. — J’ignore encore quand nous arriverons à Copenhague ; je crois que nous traverserons le petit Belt demain ; mais les rapports qu’on nous fait du grand diffèrent beaucoup les uns les autres ; les plus favorables cepen-