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CORRESPONDANCE

ne peux pas souffrir le changement de lit. — Je vous embrasse tous pour ce soir : quel agréable jour des Rois !… ma foi, s’il faisait aussi froid qu’aujourd’hui, ils y avaient bien quelque mérite.


Mardi 7, à Schleswig.

Ce n’est pas sans peine et sans fatigue que nous sommes ici, je vous assure, ma bonne maman. Je n’en puis plus de froid. Si je ne craignais pas n’être pas en état de faire une longue course, j’opinerais pour que nous fissions neuf milles d’Allemagne demain ; alors nous pourrions espérer d’arriver jeudi à Aarö où l’on passe le petit Belt. Je tâcherai de vous écrire de là, ne fût-ce qu’un mot. Ce qui est assez extraordinaire, c’est qu’on ne connaît pas plus l’état actuel des Belts qu’en Angleterre : ce peuple me paraît de la plus grande apathie. Mon Dieu ! que je voudrais être allemande ! — Adieu, ma bonne et chère maman ; embrassez papa et Rainulphe pour moi. Quoique j’écrive avec des gants, mes doigts sont tellement gelés que je puis à peine tenir ma plume. Mille amitiés aux bons O’Connell ; le sort de cette malheureuse femme m’occupe sans cesse.



Kalding, vendredi 10 janvier 1800.

C’est à toi, mon bon ami, que je veux écrire. Peut-être est-ce la seule lettre que tu recevras de ta vie datée du Jutland ; d’ailleurs, il faut que je t’apprenne une nouvelle qui, sans doute, t’intéressera parce que j’imagine que, depuis mon départ, tu t’occupes assez de la géographie du pays que je traverse pour savoir que le petit Belt se