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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

en vain, je cherche à la chasser ; elle me poursuit et m’accable. Pourquoi, cher papa, t’es-tu séparé de ton Adèle plus tôt qu’un absurde et barbare devoir ne le commandait ? is it kind ? — L’échantillon que j’ai de mon voyage répond à ce que j’en attends. Depuis Londres jusqu’ici cependant, mon compagnon et moi avons gardé un morne silence et, depuis ce temps, il ne s’est passé que des formules de politesse. — Grace au bonheur qui m’accompagne toujours, un des chevaux de ma voiture s’est abattu en sortant de Londres et s’est estropié de manière à ne pouvoir plus aller. Après un arrêt d’une heure, on s’est décidé à le remplacer par celui de John et nous avons continué notre triste route. Si quelque chose avait pu m’amuser c’eût été la terreur de mon compagnon pendant l’heure qui a précédé notre arrivée dans cet endroit que nous n’avons atteint qu’à six heures. — Adieu, chers amis ; je réunis la maisonnée pour l’embrasser comme je l’aime. — Parlez-moi en détail de cette pauvre madame O’Connell. — Mes yeux me font un mal horrible ; je n’en puis plus. Adieu.


Yarmouth, mercredi 13.

Monsieur de Boigne est encore indécis sur le packet boat qui doit nous transporter de l’autre côté de l’eau. Il paraît que la Princesse Royale est un des petits packets qui, pendant la paix, font le trajet de Douvres à Calais, et, dans ce moment ici, le Prince d’Orange et le Dolphin sont à Yarmouth. Monsieur de B. préférerait un de ces derniers qui sont du double plus grands, mais nos voitures sont déjà à bord de la Princesse Royale, de manière qu’il faudra nous séparer, ce qui a toujours beaucoup d’incon-